ℹ️  Aujourd’hui on est sur un article long, parce que j’ai essayé de faire le tour de la question en n’oubliant aucune des obligations RSE. N’hésitez pas à utiliser le sommaire pour aller à la partie qui vous intéresse. 

Commençons par le commencement : la démarche RSE concerne toutes les entreprises, de toute taille, statut ou secteur d’activité. Mais il y a une différence entre « être concerné » et « être obligé », on est d’accord 😉. Dans le domaine de la RSE, les obligations quand elles existent ne portent pas sur des seuils ou des objectifs quantifiés, mais sur la transparence et la communication honnête.

L’objectif de cet article est de rentrer dans le détail des obligations légales qui s’appliquent aux entreprises françaises. Pas facile de s’y retrouver dans cette jungle de normes, lois et référentiels, alors suivez le guide ! 🧭

Pour ceux qui ont la flemme de lire parce que « la loi, c’est chiant » : le point à retenir c’est que si la RSE n’est pas obligatoire pour toutes les entreprises aujourd’hui, elle le sera très bientôt !

Pas d’obligations RSE à l’international

Effectivement, il n’y a pas de législation internationale autour de la démarche RSE. Par contre, il existe de nombreuses soft laws à prendre en compte sur la base du volontariat.

C’est quoi une soft law ? Il s’agit de textes de droit non contraignant, qui peuvent être adoptés ou non, interprétés ou non. Dans le cadre de la RSE, les soft laws incluent des normes, des labels, des principes directeurs et des chartes.

Si vous avez besoin d’un rappel sur la définition de la RSE, direction cet article avant de poursuivre.

⬇️ Faisons un focus sur les soft laws internationales qu’il faut absolument connaître en RSE

Logos de la norme ISO 26000, des ODD, du Global Compact et du GRI

La norme ISO 26000 – 2010

Les normes ISO vous connaissez probablement déjà. ISO c’est en fait le nom de l’organisme qui élabore ces normes : Organisation Internationale de Normalisation. On trouve des normes ISO sur tous les produits, services, industries et technologies imaginables.

 

👉 En matière de RSE, c’est la norme ISO 26000 qu’il faut connaître, et c’est presque la seule à connaître d’ailleurs. Pour trois raisons, parce qu’elle :

    • est issue d’un consensus international, et c’est une première dans le domaine de la RSE
    • sert de base à de nombreuses autres initiatives et notamment aux labels RSE
    • se veut claire et applicable aux entreprises de toutes tailles et tous secteurs

❗️ Une norme n’est pas une loi, et elle ne contient aucune obligation. La norme ISO 26000 présente simplement des recommandations, ou des lignes directrices qui aident les entreprises qui le souhaitent à prendre la responsabilité de leurs enjeux sociaux et environnementaux.

 

💡 Un bon point de départ pour appréhender la norme est de découvrir les 7 grands thèmes qui la composent :

    • Gouvernance de l’organisation
    • Droits de l’homme
    • Relations et conditions de travail
    • Environnement
    • Communautés et développement local
    • Questions relatives aux consommateurs
    • Loyautés des pratiques

Les ODD — 2015

Les Objectifs de Développement Durable des Nations Unies, que vous avez probablement déjà croisé puisqu’ils sont utilisés depuis 2015. Ils représentent des objectifs (oui c’est dans le titre 🙈 ) à atteindre d’ici 2030 dans 17 domaines et pour l’ensemble des 293 pays engagés.

poster des 17 ODD
Les 17 ODD, ou objectifs de développement durable de l'ONU

Au-delà d’une liste d’objectifs, ce sont surtout des centaines d’indicateurs suivis, et des initiatives à l’échelle nationale et internationale pour faire évoluer ces indicateurs. C’est un socle commun mondial, mais qui encore une fois ne contient pas d’obligations réglementaires.

Certes, les ODD ciblent surtout les pays. Mais les entreprises font bien sûr partie de l’écosystème du pays et sont naturellement incluses dans la démarche.

 

🔗  Découvrez chaque objectif en détail sur le site des nations unies.

💡 Pour votre entreprise, la bonne pratique est de trouver les 2 ou 3 ODD (pas plus) qui sont liés à vos activités et trouver une ou deux actions pour aller plus loin, à votre échelle, sur ces objectifs.

Le Pacte Mondial (ou Global Compact) — 2000

Le Pacte Mondial est une charte de 10 principes à destination des entreprises qui souhaitent montrer leurs engagements. Encore une fois, aucune obligation, les entreprises signent cette charte si elles le souhaitent. Les principes concernent quatre grands thèmes :

    • les droits de l’homme
    • les normes du travail
    • l’environnement
    • la lutte contre la corruption

Les signataires s’engagent à progresser dans chacun de ces domaines et à remettre chaque année un rapport de leur progrès appelé « Communication sur le Progrès » (COP).

 

🔗  Plus d’informations sur le site du réseau en France : https://www.globalcompact-france.org/

Le GRI — 2000

Le GRI « Global Reporting Initiative » est une ONG qui s’est donné pour mission de rendre la pratique du rapport RSE courante dans les entreprises. GRI a donc créé des listes d’indicateurs pour aider les entreprises à rédiger leur rapport RSE. C’était la première version du GRI, puis en 2016, les lignes directrices ont pris la forme de normes, ou « standard » en anglais. En plus des recommandations et conseils, ces standards contiennent maintenant des contraintes.

👉 Pas d’obligation réglementaire encore une fois, mais si votre entreprise souhaite déclarer ses rapports « en conformité avec le GRI », alors il va falloir satisfaire toutes ces contraintes.

 

Les normes GRI balaient un large éventail d’impacts économiques, environnementaux et sociaux. Tous les secteurs sont représentés et les entreprises ont largement adopté ces normes aujourd’hui.

❗️ Réputées complexes et exigeantes, elles sont malheureusement assez peu adaptées aux PME et TPE.

Et en France alors, RSE obligatoire ou volontaire ?

Et c’est là que je vous perds puisque je commence à parler loi, et code civil avec des dates qui remontent à plus de 20 ans… 😨 Je sais c’est dur, mais accrochez-vous, ça vous concerne peut-être et on parlera du futur juste après !

➡️  Si vous avez l’impression d’avoir le couteau sous la george financièrement parlant, et que vous nez voyez pas comment investir en RSE, sachez qu’il existe de nombreuses aides. Je les ai rassemblé dans une base de donnée par ici.

Lois Grenelles I et II — 2007 et 2010

Je suis obligée de faire un point Grenelle. Parce que ces lois sont tout simplement trop connues pour ne pas les citer.

❗️ La subtilité, c’est qu’elles ne sont plus vraiment d’actualité.

Les lois Grenelle I et II de 2007 et 2010 sont connues en France pour avoir fait avancer le droit de l’environnement. L’objectif était de formuler un cadre d’action pour répondre à l’urgence climatique. La loi Grenelle 2 avait secoué les entreprises avec son obligation de reporting des informations RSE ainsi que le contrôle de la véracité de ces informations par un organisme tiers indépendant.

💡 Donc en matière de RSE, on oublie les lois Grenelle, sauf pour le cours d’histoire, puisqu’elles ont été remplacées pas de nouvelles lois.

DPEF —2017

Il s’agit d’une directive européenne prise en 2014 et qui a été transposée en France en 2017. Oui 3 années pour traduire le texte, ça me semble correct 😅.

La Déclaration de Performance Extra-Financière a pour but de créer un nouvel outil de pilotage de l’entreprise qui prend en compte les axes sociaux, environnementaux, la lutte contre la corruption et les droits de l’homme.

C’est un rapport RSE 2.0 en quelque sorte pour inciter les grandes entreprises à prendre la responsabilité de leurs impacts. Et pour être tout à fait clair, oui, on est bien dans une obligation légale cette fois-ci. 👀

 

🔎  Qui est concerné par la DPEF ?

    • les grandes entreprises cotées de plus de 500 employés et avec un CA > 40 millions d’euros
    • les grandes entreprises non cotées de plus de 500 employés et avec un CA > 100 millions d’euros
    • les établissements désignés d’intérêt public par la directive (établissements de crédit, assurances, mutuelles et institutions de prévoyance)

 

⚖️  Quelle est l’obligation légale ?

Le DPEF rend obligatoires le suivi et la publication des informations RSE de l’entreprise, en fonction de leur matérialité.

🤓 Attention, jargon RSE : La matérialité d’un enjeu est la pertinence de cet enjeu en fonction des activités de l’entreprise et des risques principaux qui la touchent. L’outil appelé la matrice de matérialité sert à identifier les enjeux principaux d’une entreprise

 

👉 Plutôt qu’une lourdeur administrative, ce rapport doit être vu comme une opportunité pour les entreprises de communiquer ses engagements et aussi de progresser en matière de RSE sur les sujets qui comptent aux yeux de ses clients.

Loi sur le Devoir de vigilance — 2017

Cocorico 🇫🇷 , la France est la première à adopter cette loi contraignante pour la responsabilité des entreprises privées internationales !

La loi a pour but de remettre le respect des droits de l’homme dans le top des priorités des entreprises internationales.

Certes, ce principe existait depuis longtemps dans les soft laws internationales autour de la RSE, mais la France a quand même fait l’effort de l’inscrire dans le droit.

 

🔎 Qui est concerné ?

Les entreprises de plus de 5000 salariés en France ou 10 000 employés si le siège est à l’étranger.

 

⚖️ Quelle est l’obligation légale ?

Le devoir de vigilance stipule que les multinationales portent la responsabilité des dommages causés par toute la chaîne de leurs activités. Ces entreprises donneuses d’ordres ont donc pour obligation de prévenir tout risque social, environnemental et de gouvernance lié à leurs opérations, incluant leurs filiales, partenaires, fournisseurs et sous-traitants.

 

👉  C’est un sujet complexe et je vous recommande cette lecture pour en apprendre plus : https://www.amnesty.fr/focus/devoir-de-vigilance

La Loi Pacte et la RSE — 2019

La loi PACTE, ou Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises, a pour ambition comme son nom l’indique de stimuler la croissance des entreprises de manière durable.

Elle montre que l’entreprise n’est plus simplement un outil de création de richesse, mais qu’elle produit des impacts sur son écosystème, qui doivent être pris en compte.

 

🔎  Qui est concerné ?

Toutes les entreprises françaises, sans distinction.

 

⚖️  Quelle est l’obligation légale ?

Toutes les entreprises doivent prendre en considération les enjeux sociaux et environnementaux dans leur gestion. « Prendre en compte » c’est vague, mais ça veut surtout dire qu’aucun dirigeant ne peut plus ignorer les impacts de ses activités.

À cette obligation, la loi PACTE a aussi ajouté deux nouveautés, uniquement sur la base du volontariat :

    • 1️⃣  la raison d’être – les entreprises qui le souhaitent peuvent formuler et déployer leur raison d’être
    • 2️⃣  le statut d’entreprise à mission – les entreprises volontaires peuvent adopter ce rôle contraignant et s’engager encore plus au service du bien commun

 

👉 La Loi PACTE est dense et contient de nombreuses autres mesures, un petit aperçu sur le site du gouvernement.

Le Bilan Carbone

Le fameux ! On ne le présente plus.

 

🔎 Qui est concerné ?

Les entreprises privées de plus de 500 salariées.

 

⚖️ Quelle est l’obligation légale ?

Pour l’instant, la loi oblige ces entreprises à réaliser un bilan carbone simplifié, qui consiste à calculer l’empreinte carbone de l’entreprise sur les scopes 1 et 2. Ces scopes concernent les émissions directes de gaz à effet de serre et les émissions indirectes associées à l’énergie.

 

👉  La prise en compte du scope 3, qui comprend toutes les autres émissions indirectes (sans être liées à l’énergie consommée), est fortement recommandée, mais pas obligatoire.

Classification des normes et lois qui existent à l'international et en France en RSE
Tentative de clarification des normes et lois autour de la RSE à travers un tableau

Qu’en est-il des TPE et PME ?

Peu d’obligations légales autour de la RSE concernent les TPE et PME à date (mai 2022).

Ouf, me direz-vous 🥳.

❗️ Mais j’attire votre attention sur deux points :

    • les marchés publics, donneurs d’ordre et investisseurs intègrent des critères RSE dans leurs cahiers des charges,
    • les grandes entreprises soumises au devoir de vigilance impactent directement les TPE et PME qui les fournissent ou sont leurs sous-traitants.

 

👉 Donc les TPE et PME qui travaillent dans le secteur public OU qui travaillent avec de grandes entreprises doivent anticiper ces critères et être engagées dans une démarche RSE pour continuer à avoir du business.

 

➡️  Si vous avez besoin d’aide pour naviguer cette jungle de normes, loi et référentiels RSE, le mieux est de faire appel à un expert RSE pour vous aiguiller vers les textes les plus pertinents pour vous. On peut en discuter ensemble, n’hésitez pas à me contacter.

Ce qui va changer en 2023 : la directive CSRD

La directive CSRD « Corporate Sustainability Reporting Directive » est une directive européenne qui fixe un nouveau cadre pour le reporting de la démarche RSE des entreprises et pour le bilan carbone.

⏳ Elle sera ajoutée au droit français dès la fin de l’année 2022. Son application sera vraisemblablement au 1er janvier 2024 sur l’exercice 2023. Les infos à jour sont disponibles (en anglais) sur le site de la Commission Européenne directement.

 

🔎 Qui sera concerné par la CSRD ?

Les entreprises qui remplissent deux des trois critères suivants :

    • avoir un bilan de 20 millions d’euros ;
    • réaliser 40 millions d’euros de chiffre d’affaires ;
    • employer au moins 250 salariés.

 

⚖️  À quoi s’attendre ? Entre autres :

    • Un bilan carbone étendu au scope 3
    • la publication transparente des progressions de l’entreprise en matière d’indicateurs RSE,
    • la publication d’une stratégie de développement durable associée aux moyens précis que l’entreprise compte mettre en œuvre pour l’accomplir

 

❗️Attention, la Commission souhaite adopter des normes distinctes et « proportionnées » pour les PME dépassant deux des trois critères suivants :

    • un bilan de 4 millions d’euros ;
    • un chiffre d’affaires de 8 millions d’euros ;
    • un effectif de 50 salariés.

 

👉 Vous l’aurez compris, même si vous n’êtes pas concerné par des obligations de reporting RSE aujourd’hui, la loi bouge vite, et il est temps d’anticiper  avec l’aide d’un consultant comme moi-même ou en interne !

Ce qu’il faut retenir

  • Jusqu’à présent, les obligations légales en matière de RSE touchaient principalement les grandes entreprises. La loi va vraisemblablement imposer des reporting plus complets à ces entreprises, et élargir aux TPE et PME.
  • ❗️ Dès le 1er janvier 2023, la directive CSRD va venir remplacer le DPEF et renforcer les obligations existantes.
  • Il est grand temps d’anticiper de quelques mois cette nouvelle loi en initiant une démarche RSE dans votre entreprise.
  • Et rappelez-vous que votre obligation n’est pas uniquement envers la loi, mais aussi envers vos consommateurs et vos employés. Alors si on considère tous ces aspects, la RSE n’est pas encore obligatoire pour toutes les entreprises, mais elle est très fortement recommandée !